•  



    Le temps d'être et celui d'avoir,


    Le temps d'admettre et celui de savoir


    Le temps de permettre et celui de donner


    Le temps de commettre et celui de blâmer


     



    Le temps de débattre et celui de craindre


    Le temps de battre et celui de plaindre


    Le temps de connaître et celui d'apprendre


    Le temps de renaître et celui de comprendre.



     


    Le temps de tromper et celui de regretter


    Le temps de feindre et celui d'ignorer,


    Le temps de geindre et celui de pleurer


    Le temps d'espérer et celui d'aimer



     


    Le temps de marcher et celui de courir


    Le temps de hâter et celui de ralentir


    Le temps de rabaisser et celui de maudire


    Le temps de désirer et celui de haïr



     


    Le temps d'aller et celui de venir,


    Le temps de quitter et celui de guérir,


    Le temps de pardonner et celui de grandir


    Le temps d'élever et celui de chérir.


     


    Donald Gunn


    photo :Christian Coigny


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  • Le poète




    Avant je circulais dans la vie, un amour
    douloureux m'entourait: avant je retenais
    une petite page de quartz
    en clouant les yeux sur la vie.
    J'achetais un peu de bonté, je fréquentais
    le marché de la jalousie, je respirais
    les eaux les plus sourdes de l'envie,l'inhumaine
    hostilité des masques et des êtres.
    Le monde où je vivais était marécage marin:
    le fleur brusquement, le lis tout à coup
    me dévorait dans son frisson d'écume,
    et là où je posais le pied mon coeur glissait
    vers les dents de l'abîme.
    Ainsi naquit ma poésie, à peine
    arrachée aux orties, empoignée sur
    la solitude comme un châtiment,
    ou qui dans le jardin de l'impudeur en éloignait
    sa fleur la plus secrète au point de l'enterrer.
    Isolé donc comme l'eau noire
    qui vit dans ses couloirs profonds,
    de main en main, je coulais vers l'esseulement
    de chacun, vers la haine quotidienne.
    je sus qu'ils vivaient ainsi, en cachant
    la moitié des être, comme des poissons
    de l'océan le plus étrange, et j'aperçus 
    la mort dans les boueuses immensités.
    La Mort qui ouvrait portes et chemins.
    La Mort qui se faufilait dans les murs.


    Pablo Neruda

    (extraits: Chant général, Les fleurs du Pinataqui, p.381
    Gallimard, Collection Poésie.)

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  • I



    Corps de femme, blanches collines, cuisses blanches,
    l'attitude du don te rend pareil au monde.
    Mon corps de laboureur sauvage, de son soc
    a fait jaillir le fils du profond de la terre.



    je fus comme un tunnel. Déserté des oiseaux,
    la nuit m'envahissait de toute sa puissance.
    pour survivre j'ai dû te forger comme une arme
    et tu es la flèche à mon arc, tu es la pierre dans ma fronde.



    Mais passe l'heure de la vengeance, et je t'aime.
    Corps de peau et de mousse, de lait avide et ferme.
    Ah! le vase des seins! Ah! les yeux de l'absence!
    ah! roses du pubis! ah! ta voix lente et triste!



    Corps de femme, je persisterai dans ta grâce.
    Ô soif, désir illimité, chemin sans but!
    Courants obscurs où coule une soif éternelle
    et la fatigue y coule, et l'infinie douleur.



     



     



    photo : Christian Coigny


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  •  


    La vie qu'il donne est belle


    Si demain il m'appelle


    Sitôt j'irai vers lui


    Qui la rend eternelle


    En lui disant merci.


    Si enfin il me dit


    Tu dois rester aussi


    Un autre grand merci


    Surtout pour me laisser


    Quand même achever


    Ce qui n'est pas fini


    Oter le gris de votre vie!


    Chasser la poussière


    Vous montrer la lumière!


    Je vous ai donné toute ma vie


    Un jour vous devrez me la rendre


    Quand il sera las de m'attendre.


    Alors, je dirai, je suis prête,


    Plus rien vers Toi ne m'arrête.


    Pardon pour mes défaillances


    Je crois en ta Bienveillance


    Etends là sur ma descendance


    Et au père de celle-ci,        


    Pour tout cela merci

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    Ainsi jetés l'un devers l'autre
    Le lit de l'amour grand ouvert
    Des doigts des lèvres délivrant
    Des incendies de céréales
    Des oasis des trouées d'or
    Des nids dans la nuit de nos corps


    Ainsi roulés de vague en vague
    Parmi les planètes du sang
    Dérivant à l'envers du temps
    Nageurs remontant vers les sources
    Nous allons naître corps à corps
    De l'eau des neiges du néant


    Ainsi l'un de l'autre affolés
    À nous respirer nous résoudre
    À nous découdre fil à fil
    La nudité jusqu'à la trame.
    Tu m'engloutis dans ton soleil
    Je crève en toi l'oeil de la mort


    Ainsi basculés sans mémoire
    Dans cette lumière animale
    Le lait du monde cogne en moi
    Des rosées de toi s'évaporent
    Nous abordons des aubes d'îles
    Où brûle un grain d'éternité


    Jean Vasca


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